
Natif de Cannes, Franck Lebraly vit entre Paris et le sud de la France. Assez naturellement ses projets voient plutôt le jour dans le sud du fait de l’ADN très méditerranéenne de son travail.
Ancien directeur artistique dans la publicité (il a notamment travaillé pour Guerlain ou encore Cartier), Franck s’est petit à petit reconverti depuis la période Covid. En charge de l’identité graphique d’un hôtel à Juan les Pins, il a également réalisé plusieurs fresques pour ce lieu ce qui a marqué le début d’une nouvelle aventure artistique.
Aujourd’hui, son activité principale réside donc dans la peinture. Elle se divise en quatre catégories principales que sont l’identité graphique (toujours avec une dimension artistique puisque l’idée part du dessin et non d’un logiciel), la fresque, qui représente aujourd’hui 40% de son travail (peinture ou pastel, murs ou plafonds, pour des hôtels, des restaurants, des collectivités ou des particuliers), la peinture sur toile, et la céramique. Son travail créatif a également été mis en lumière via des collaborations artistiques avec des marques telles que La Roche-Posay, des designer tels que Sophie Ferjani ou des évènements tels que le Refugee Food Festival à Nice.
Si sa vie et son travail sont très tournés vers le sud, son univers olfactif ne l’est pas moins, comme en témoigne son abécédaire de souvenirs olfactifs.
A comme Ateliers
Mon père était restaurateur d’objets d’art. Il travaillait dans un atelier avec un sol en pierres dures, très réactif aux températures, quand il faisait froid le sol était gelé et par temps chaud il était brûlant. Froid, ce sol avait une odeur particulière qui, mélangée avec les produits que mon père utilisait pour restaurer (un mélange d’acétone et de pigments) était l’odeur typique de ce lieu.
De la même manière, mon grand-père, italien, était ébéniste. Chez lui cela sentait la sciure et le parmesan ! Ce sont des odeurs que j’arrive très bien à me figurer aujourd’hui encore, mais que je ne retrouve nul part.
C comme Clafoutis
J’avais une grand-mère paternelle que je ne voyais que durant les vacances. Quand elle venait, elle cuisinait beaucoup. C’était souvent au mois de mai, quand on ramassait les cerises dans le jardin. Je garde un souvenir tout particulier du goût et de l’odeur de ses clafoutis… Odeur que je n’ai jamais retrouvée. Quand cela sentait le clafoutis, je savais qu’elle était là ! C’est donc une odeur que j’associe à ma grand-mère mais aussi aux vacances, au printemps, à cette période de joie et de renouveau.
E comme Ecole
Dans le sud, il y a beaucoup d’oliviers et de lauriers dans les cours d’écoles. Quand le soleil tapait, je me souviens que l’on sentait l’odeur du bitume chaud qui se mélangeait à celles des oliviers et des lauriers. Il m’arrive de ressentir ce mélange d’odeurs quand je passe dans certains quartiers, cela me renvoie toujours au souvenir de la cour de mon école.
F comme Flacon
J’aime le parfum et j’aime me parfumer. En ce moment je porte Cologne d’Etat Libre d’Orange. J’y retrouve la fleur d’oranger et les parfums d’agrumes que j’affectionne. C’est très doux, très frais, et j’aime l’idée que ce soit une marque de niche, à petite échelle. J’ai aussi porté Acqua di Gio, j’aimais la fraicheur marine de ce parfum, aujourd’hui trop senti.
G comme Grossiste
Il y avait un grossiste en eau de fleur d’oranger dans le quartier où j’ai grandi au Cannet, sur les hauteurs de Cannes. Quand on passait devant, cela sentait le chamallow, si bien que l’on a toujours pensé que c’était une fabrique de bonbons. Ce n’est que bien plus tard que nous avons su qu’il s’agissait d’un grossiste et non d’un confiseur !
K comme Klein
Si je devais donner une odeur à mon travail, ce serait celle de la mer. Yves Klein voulait « peindre l’invisible », la densité de la mer, du ciel, sans que la peinture ne soit figurative. Il cherchait à peindre l’irréel. Dans mon travail, j’utilise beaucoup le bleu Klein, et plus généralement le bleu. Représenter cette densité nous amène vers des œuvres monochromatiques. J’aime l’idée de représenter quelque chose d’infini, qui est en nous, jamais immobile, toujours en vie.
M comme Maroc
Toute une partie de ma famille est originaire du Maroc. Je suis donc très familier avec les senteurs de la cuisine marocaine. Quand il m’arrive de me rendre à Marrakech, et que je me balade dans les marchés, les souks, il y a toujours ce mélange d’odeurs qui me rappelle chez moi. Bien-sûr il y a les épices, le cumin, la cannelle, mais aussi les boutons de roses, le miel.
N comme New-York
Pour moi l’odeur de New-York c’est l’odeur des bretzels chauds ! Dans certains quartiers, il y a des vendeurs de bretzels dans la rue et pour moi cette odeur est très typique des rues de la ville.
O comme Orangers
J’ai un vrai lien avec le parfum depuis l’enfance. Je suis né à côté de la rue des orangers au Cannet. Mon école embaumait les orangers. Je me rends compte que cela est très présent dans mes dessins, je dessine beaucoup d’agrumes. J’aime aussi beaucoup les utiliser en cuisine, tout comme la fleur d’oranger qui est mon odeur préférée !
P comme Pestilenciel
Il y a une colle qu’utilisent les ébénistes qui s’appelle la colle d’os : pour moi c’est la pire odeur du monde ! C’est animal, scatolique… insoutenable. Un peu comme le fruit du durian, même si dans ce cas l’odeur est plutôt butyrique, écœurante.
S comme Sicile
Mes grands-parents sont originaires de la région de Palerme et Agrigente, quand je me rends dans des villages dans cette région de Sicile j’aime faire des promenades en bord de mer : la côte est arborée de citronniers, ça sent l’écorce de citron, c’est incroyable, un rêve !
Sur l’île de Stromboli, il y a aussi ce parfum de jasmin qui s’élève le soir, sur fond de coucher de soleil et d’éruption volcanique, cela donne une dimension olfactive au paysage, c’est magique.

En tant qu’artiste, Franck Lebraly constate une vraie relation entre Art et Parfum, et pense que ces domaines sont de plus en plus liés. Bien que son travail soit très figuratif, il cherche également à y intégrer des choses qui l’ont marqué, et cela peut passer par les odeurs : « Je dessine beaucoup de citrons, de plantes, de poissons aussi, pour le rappel à la mer, et pour leur forme qui est assez parfaite à dessiner, avec une représentation la plus simple et épurée possible. »
Il décrit ses compositions comme denses, avec des éléments qui s’imbriquent les uns dans les autres, un peu comme une « rivière de garrigue » comme le dit Pagnol, dans laquelle on est submergé par la nature et les odeurs qui en émanent.
Instagram : @f.lebraly





