
Dans Les Fleurs du Mal, Charles Baudelaire met tous les sens en poésie et le parfum y trouve bonne place, notamment dans la première partie du recueil intitulée Spleen et Idéal.
Si de nombreux parfums naturels sont cités tels que le musc, l’ambre ou encore « le parfum vert des tamariniers », Baudelaire utilise également la synesthésie afin de décrire une odeur. Ainsi dans Correspondances il évoque des parfums « frais comme des chairs d’enfants, doux comme les hautbois, verts comme les prairies », associant l’odorat au toucher, à l’ouïe et à la vue.
Le poème qui suit s’intitule Le Parfum. Au delà du lien entre le parfum et le souvenir, il illustre parfaitement toute cette sensorialité, des parfums naturels à ceux plus évocateurs tels qu’un « parfum de fourrure », faisant référence à des notes riches, enveloppantes, synonymes de luxe et de volupté.
Le Parfum
Lecteur, as-tu quelquefois respiré
Avec ivresse et lente gourmandise
Ce grain d’encens qui remplit une église,
Ou d’un sachet le musc invétéré ?
Charme profond, magique, dont nous grise
Dans le présent le passé restauré !
Ainsi l’amant sur un corps adoré
Du souvenir cueille la fleur exquise.
De ses cheveux élastiques et lourds,
Vivant sachet, encensoir de l’alcôve,
Une senteur montait, sauvage et fauve,
Et des habits, mousseline ou velours,
Tout imprégnés de sa jeunesse pure,
Se dégageait un parfum de fourrure.
Charles Baudelaire
Les Fleurs du Mal (1857)

Illustration du poème Le Parfum
par Henri Matisse.
